Ce texte ne s’adresse pas à vous si vous
êtes un expert ou simplement un bon amateur de belles lettres, rapports
et communications en tout genre. Dans ce cas vous n’aurez aucun problème
pour trousser une centaine de pages bien organisées et convaincantes,
ou même pour empiler 30 000 mots bien pasteurisés, conformes à la doxa
et presque vierges de fautes d’orthographe. Quant bien même feriez-vous
des efforts pour être médiocre vous n’y arriveriez pas. Car c’est tout
un art de perdre. Tout un art, et il faut y mettre de l’acharnement.
Si vous voulez échouer, ne surtout pas recevoir le « 10 » salvateur, voilà les 7 commandements.
- N’ayez qu’une vague idée de votre propos.
C’est fondamental. Vous avez pu faire agréer
votre projet de mémoire. Le sujet en était suffisamment attractif, bien
étayé par votre expérience, prestement présenté, et le jury, après
quelques échanges pour la forme, lui a donné sa bénédiction. Tout se
présente bien. Mais non : vous êtes rusé. En réalité tout cela n’était
que façade brillante mais creuse, comme certains palais des Indes. Vous
n’avez bâti qu’un édifice résolument bâclé à base d’idées générales
affriolantes mais qui dans votre tête ne débouchent pas sur grand-chose.
Le plan détaillé a convaincu les examinateurs mais il vous laisse
plutôt sceptique. La somme des nombres de pages de chaque partie atteint
magiquement 100 (voire 102, pour faire « plus vrai »). Mais ces volumes
ont été décidés au doigt mouillé, sous l’impulsion d’un optimisme bien
chevillé au corps. En fait : vous n’en savez rien et n’avez qu’une idée
floue du contenu de chaque section.
- Mettez-vous au travail sans hâte.
En vous attelant à la tâche sans délai vous
pourriez prendre conscience, malgré vous, de l’ampleur du problème,
peut-être même retrousser vos manches et prendre goût à cet exercice du
mémoire, qui vous rebute tant. Erreur capitale. Pour aller droit à
l’échec tant désiré il faut savoir attendre. Laisser passer les
vacances. Prétexter le boulot, les arrêtés de comptes, l’arsenal
habituel des prétextes en or. Attendez les dernières semaines. Sinon ce
n’est pas drôle.
- Compensez vos lacunes par des emprunts coupables.
L’antisèche est l’arme immémoriale des faux
petits malins. Pour peu que vos petits plagiats se remarquent, qu’ils
déclenchent les clignotants des logiciels espions, vous décrocherez la
timbale en montrant le peu de cas que vous faites de la déontologie.
Imparable. Tellement radical que pour prolonger un peu le jeu pervers
que vous menez vous éviterez d’aller trop loin dans cette direction.
- Faites lourd et compliqué.
C’est une façon d’avoir l’air savant.
N’écrivez pas « problème » mais « problématique », « occasion » mais
« opportunité ». N’assurez pas que tel phénomène « est », mais qu’il
« constitue ». Glissez un peu de grec ou de latin, ou d’anglais (qui
n’est que le latin des temps actuels et vous l’utiliserez de façon
volontiers maladroite) et usez largement de la périphrase. Exercice
pratique : «le problème de la gestion des troupeaux de rennes, base de
la culture lapone, est une occasion de gain » deviendra : « la
problématique du management des ongulés nordiques, qui constitue l’alpha
et l’omega de la culture lapone, est une opportunité de profit ».
Saupoudrez de fautes d’orthographe inattendues, et je vous assure qu’au
bout de trente ou quarante pages de cette pâtée indigeste le lecteur
s’assoupit (au risque de devenir indulgent) ou jette l’éponge. Bingo !
Recommencez ce qui vous semble mauvais,
changez les idées sans souci de cohérence, ajoutez à la diable de
nouvelles annexes sans mettre à jour votre texte (ce qui fait que le mot
« annexe 12 » qui renvoyait à juste titre à une étude sur les rennes
lapons va maintenant correspondre à un graphique sur la production
laitière – le lecteur est perdu, c’était le but).
- Beaucoup trop tard, faites appel à un écrivain public.
Par exemple mi-janvier, pour corriger un
texte horrible à rendre le 13 février. Non seulement vous risquez de
tomber sur des professionnels indisponibles, car déjà bien occupés par
des clients plus prévoyants (ils ont signé avec eux fin novembre) mais
si par malheur vous en trouvez un qui a un peu de temps vous pourrez
vicieusement le faire lanterner (en lui envoyant votre mémoire deux
semaines plus tard que promis) et ainsi le mettre au supplice, et,
suprême raffinement vous pourrez le menacer ensuite d’un procès en
considérant qu’il porte le poids de l’échec. Sublime.
- Vous repassez à la session suivante ? n’en démordez pas !
Malgré tous vos efforts, et peut-être grâce à
l’héroïque écrivain public ou une soutenance animée, vous avez eu 9.
Encore un peu et vous y serez ? Non, pour éviter cette issue regrettable
il vous reste une solution : ne (presque) pas tenir compte des
observations du jury. Un tout petit peu pour pouvoir prétendre l’avoir
fait, mais vraiment très peu. C’est un moyen infaillible pour irriter
les examinateurs …
Bon, redevenons sérieux. Si vous voulez surmonter cette épreuve du mémoire il faut évidemment éviter ce qui est énuméré ci-dessus, et cette liste n’est pas si farfelue. Un peu grossies sans doute, ce sont des erreurs classiques des candidats. On les rencontre souvent. Alors pour commencer, si votre style, discours, orthographe et syntaxe vous préoccupent, cherchez à vous entendre avec un prestataire en écriture sans trop tarder, par exemple en novembre pour le dépôt de février. Vous n’en aurez que plus de temps pour faire le tour avec lui des services qu’il peut vous rendre.